Pétition pour la sauvegarde de la place de Grandson: à signer avant le 20 août!


5 juin 2024

Notre section relaie une pétition concernant la sauvegarde de deux bâtiments donnant sur la place du château de Grandson, menacés de démolition (la mise à l’enquête est promise cet été), à savoir l’ancien hangar des pompes et local de gymnastique, datant de 1892 (NRA 3), et l’ancienne chapelle de l’Eglise libre, construite en 1898 sur les plans de l’architecte Gustave Chable (NRA 3).

La place de Grandson est un dossier que PSSV suit depuis plusieurs années. Notre section a eu de nombreux échanges avec la Commune, le Canton et l’Office fédéral de la culture afin de sensibiliser ces différentes autorités à l’intérêt patrimonial de ces deux bâtiments situés sur un site hautement sensible, faisant face au château de Grandson, en cours de restauration. PSSV a entre autres adressé en 2020 une demande de classement au Canton, demande qui a été refusée pour des raisons politiques par M. Broulis, le conseiller d’Etat alors en charge du patrimoine. Notre section est convaincue qu’au moins l’un des deux bâtiments (ancien local des pompes, qui possède une charpente remarquable) pourrait être intégré sans grande difficulté au plan de quartier de cette place, qui mérite un meilleur traitement que celui que la Commune de Grandson lui réserve.

Vous trouverez ici les fiches de recensement architectural des deux bâtiments: fiche 102 – hangar des pompes & fiche 105 – chapelle. Complétées après notre demande de classement, ces fiches démontrent bien que ces bâtiments ont un réel intérêt patrimonial (largement sous-estimé par le conservateur d’alors qui a validé leur démolition en 2013 dans le cadre du plan de quartier).

Télécharger et signer la pétition lancée par l’Association pour la sauvegarde de la place du château de Grandson, à renvoyer avant le 20 août 2024 (attention au délai!).
Télécharger quelques photographies actuelles et anciennes des bâtiments en question.

Le patrimoine vaudois à l’honneur : des enjeux liés au patrimoine hors zone à bâtir à la sobriété énergétique


3 juin 2024

Un colloque consacré à la sauvegarde des bâtiments patrimoniaux sis hors de la zone à bâtir et la remise de la « Distinction vaudoise de Patrimoine suisse 2024 » : deux événements illustrant le dynamisme de la section vaudoise de Patrimoine suisse.

Deux événements organisés par Patrimoine suisse, section vaudoise, se sont succédé la semaine dernière, à savoir :

La révision de la loi sur l’aménagement du territoire : le jeu des 7 différences

Devant un auditoire de 160 personnes, le colloque du 30 mai dernier a réuni des experts vaudois et valaisans pour examiner la portée de la deuxième révision de la loi sur l’aménagement du territoire (LAT2) sur les bâtiments patrimoniaux sis hors de la zone à bâtir. Une analyse fine montre que parmi les rares modifications prévues, l’introduction d’une prime à la démolition risque de mener à la disparition du patrimoine vernaculaire. De plus, cette révision ne permettra pas de résoudre les problèmes liés à la sauvegarde du patrimoine dispersé. En effet, l’article consacré à l’habitat traditionnellement dispersé ne s’appliquerait qu’aux bâtiments ayant déjà accueilli de l’habitat permanent et ne concernera ainsi que les régions agricoles spécialisées dans la culture ; cette disposition ne permettra pas de sauver le patrimoine vernaculaire des régions de montagne (élevage), notamment vaudoises et valaisannes. Les Cantons de Vaud et du Valais semblent cependant convaincus de l’importance d’opter pour une lecture qui tienne compte des particularités de chaque objet patrimonial.

Le manège du château de Mathod ou l’éloge de la sobriété énergétique

A l’occasion de son assemblée générale à Mathod le 1er juin qui a réuni plus de 130 personnes, la section vaudoise de Patrimoine suisse a remis la Distinction vaudoise de Patrimoine suisse 2024 à la famille Hernan-Rivier et au bureau Dolci Architectes (Yverdon) en présence de Mme la conseillère d’Etat Isabelle Moret.

La Distinction 2024 récompense un projet qui a su trouver des solutions spécifiques, innovantes et durables, adaptées au manège de Mathod, construit au 18e siècle. En optant pour une combinaison de stratégies constructives – boîtes dans la boîte, isolations classiques, espaces non isolés – le projet atteint simultanément les objectifs de conservation patrimoniale et d’efficacité énergétique, ainsi que ceux d’une grande qualité architecturale. Sa conversion en chambres d’hôtes et en logement permet d’assurer sa pérennité.

Deux autres projets de qualité ont été nominés au 2e rang ex æquo : la transformation d’un chalet du XIXe siècle dans la vallée des Ormonts et la restauration des anciens ateliers de reliure Mayer & Soutter à Renens.

La Tour-de-Peilz, le 2 juin 2024

Photos: Liubov Krivenkova.

Loi sur l’électricité: votation populaire du 9 juin


29 mai 2024

À l’automne 2023, le Parlement a adopté la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables. Le référendum ayant abouti, nous sommes appelés à voter sur ce texte le 9 juin 2024. Patrimoine suisse renonce à donner un mot d’ordre.  

Pour Patrimoine suisse qui se concentre avant tout sur la protection des édifices et des sites construits de valeur, cette loi sur l’électricité ne revêt pas une importance capitale. Nous sommes préoccupés avant tout par la nouvelle teneur de l’art. 18a al. 1 LAT. Selon cette disposition, il sera possible à l’avenir d’installer des panneaux solaires non seulement sur les toits mais aussi sur les façades sans permis de construire, c’est-à-dire sans contrôle des autorités. Cette dispense était valable jusqu’à présent uniquement pour les toits mais son extension aux façades est un saut quantique. Comme pour les toits, cet article prévoit des restrictions dans le cas des monuments nationaux ou cantonaux ou des sites similaires. Il n’en demeure pas moins que les panneaux solaires en façade seront possibles sur plus de 90% des bâtiments. Beaucoup d’entre eux – situés par exemple en zone industrielle – se prêtent très bien à un tel usage mais il y a aussi de nombreux quartiers et localités dignes d’intérêt qui ne sont pas recensés à l’Inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger (ISOS). Des façades noires y causeraient de très gros dommages.

Il ne sera pas facile d’expliquer aux propriétaires de maisons pourquoi l’élargissement d’une fenêtre nécessite un permis de construire alors que la façade à colombages d’une ferme peut être recouverte de panneaux solaires sans la moindre autorisation. À cause de telles incohérences, cette loi suscite le scepticisme parmi de nombreux professeurs de droit public dans les hautes écoles.

Notre coeur balance

L’auteur de ces lignes a discuté de ce projet avec de nombreux membres de Patrimoine suisse et a recueilli des opinions très différentes. En résumé, l’objet est rejeté en majorité par les personnes très liées à la culture du bâti alors qu’il est approuvé par celles qui s’intéressent davantage à la politique climatique. Ces deux positions sont fortement représentées dans notre association et la plupart d’entre nous ont le coeur qui balance, d’autant plus que Patrimoine suisse soutient expressément la promotion des énergies renouvelables. Pour cette raison, un rejet du projet de loi sur l’électricité était a priori exclu.

Face à ce dilemme, une grande majorité des représentants des sections et des milieux spécialisés dans notre association souhaitaient donner la priorité à la protection des bâtiments et des sites de valeur, même s’ils accordaient aussi une grande importance aux mesures en faveur du climat. À l’inverse, une minorité voulait placer le climat au premier rang. Après une discussion approfondie, la conférence des présidentes et des présidents a décidé de ne pas donner de mot d’ordre pour la votation sur la loi sur l’électricité (acte modificateur unique) du 9 juin 2024. Finalement, les deux positions ne pouvaient pas être conciliées. Notre association doit vivre avec de telles contradictions.

Martin Killias, président de Patrimoine suisse

Plus d’informations sur le thème patrimoine bâti, énergie et climat sous patrimoinesuisse.ch/environnement-et-developpement-durable

Colloque « Le patrimoine historique hors de la zone à bâtir », 30 mai 2024


21 avril 2024

Les dispositions détaillées et complexes de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire développées au fil des années auraient dû être clarifiées et systématisées par la deuxième révision de cette loi. Longuement débattue avant d’être adoptée par les Chambres fédérales le 29 septembre 2023, elle n’a pas atteint l’objectif initial et a ajouté d’autres règles. Il est intéressant d’examiner leur portée dans le domaine sensible des bâtiments à sauvegarder hors de la zone à bâtir pour lesquels sont trop souvent opposés les objectifs stricts de non-constructibilité hors de la zone à bâtir à ceux de la préservation indispensable et légitime du patrimoine historique et traditionnel.

Trop rare sur cette problématique, la jurisprudence va-t-elle dans le bon sens? Quelles bonnes pratiques faut-il encourager? Faut-il se limiter à privilégier la sauvegarde des bâtiments emblématiques (qui soulèvent des questions délicates lors de leur restauration) ou le patrimoine bâti vernaculaire, rural et l’habitat traditionnellement dispersé nécessitent-ils aussi un traitement spécifique et plus généreux que les autres constructions hors de la zone à bâtir en contrepartie d’une approche qualitative?  Telles sont certaines des questions que traiteront les représentants des autorités, juristes, architectes et milieux associatifs réunis pour ce colloque.

Université de Lausanne, bâtiment IDHEAP, Aula, rue de la Mouline 28, Chavannes-près-Renens.

Programme

13h45 Accueil des participants

14h00 Présentation générale (protection du patrimoine et révision récente de la LAT)
Benoît Bovay, professeur à l’École de droit de l’Université de Lausanne, avocat au barreau

14h20 Les bâtiments dignes de protection hors des zones à bâtir (art. 24d LAT)
David Boulaz, chef du Service juridique de la DGTL, avocat
Richard R. Hollenweger, directeur de la Direction des autorisations de construire de la DGTL de l’État de Vaud, architecte EPFL

15h00 Cas pratiques | atelier d’architectes glatz & delachaux : domaine de Bel-Air à Eysins, châteaux de Saint-Christophe et d’Hauteville
Nicolas Delachaux, architecte EPFL/SIA 

15h40 Pause

16h00 L’habitat traditionnellement dispersé (art. 24cbis LAT)
Sébastien Thüler, chef de la Section juridique « biodiversité, territoire et environnement » de l’État du Valais, avocat

16h40 Cas pratiques | savioz fabrizzi architectes à Sion
Claude Fabrizzi, architecte HES FAS

17h20 Table ronde, synthèse et questions, avec la participation de
Catherine Gay Menzel, architecte EPFZ FAS, bureau GayMenzel Sàrl Monthey, ancienne vice-présidente de la Commission cantonale des constructions
Alberto Corbella, conservateur cantonal des monuments historiques, chef de la DGIP-MS

18h00 Apéritif

→ télécharger le programme du colloque

Finance d’inscription

Prix public : CHF 100.–
Prix membres de Patrimoine Suisse : CHF 70.–
Gratuit pour les étudiant·e·s/doctorant·e·s (Université/EPFL/HEPIA)

Inscription en ligne obligatoire d’ici au 19 mai 2024
www.unil.ch/droitpublic/CEDEAT/patrimoine

Evénement organisé par le Centre de droit public de l’Université de Lausanne et la section vaudoise de Patrimoine suisse.

Pétition de Patrimoine suisse en faveur du maintien du stade de la Pontaise


26 mars 2024

Patrimoine suisse, section vaudoise, lance un appel aux Autorités lausannoises et cantonales en faveur du maintien de l’emblématique stade olympique de la Pontaise.

Plusieurs facteurs plaident en faveur du maintien du stade de la Pontaise, construit en 1954 par l’architecte Charles-François Thévenaz et son neveu Émile Thévenaz, ingénieur civil. Inscrit depuis six ans sur la Liste rouge de Patrimoine suisse, ce stade présente non seulement un intérêt patrimonial important, mais permet aussi d’éviter une surdensification des Plaines du Loup.

Deux commissions d’experts, nommées par le Conseil d’État, sont récemment arrivées à la même conclusion: les valeurs patrimoniale et de mémoire du stade justifient de lui attribuer la note 1 et de procéder à son classement comme Monument historique d’intérêt national. On s’étonne dès lors que, malgré la clarté de ces recommandations, le département chargé de la protection du patrimoine évite obstinément de mettre en œuvre ces mesures. Cette absence de décision autorise la Municipalité de Lausanne à indiquer, dans son préavis N° 2023/71 demandant un crédit d’étude pour la reconstruction du stade Coubertin à Vidy, que «le stade de la Pontaise dispose aujourd’hui d’une note *3* au recensement architectural. […] Rien n’interdit donc aujourd’hui qu’il puisse être démoli ou profondément transformé».

Cette perspective destructrice n’est pas tolérable. L’État et la Commune devraient, sans plus tarder, accepter les avis des experts et suivre leurs recommandations. Ceci mettrait définitivement le stade à l’abri d’une démolition et poserait des bases claires pour que les futures interventions et adaptations se fassent dans le respect du monument.

Sur le plan de l’urbanisme, et en tirant les leçons de la réalisation très dense de la première étape du projet Métamorphose, il convient de se demander si ce n’est pas la vision de la Municipalité de Lausanne qui pose problème en raison de ses objectifs exclusivement quantitatifs, liés au nombre de logements et à une pure rentabilité financière. Un bon projet de développement urbanistique comprend aussi des activités et des infrastructures liées aux loisirs ou, tout simplement, une gestion des «vides», compléments indissociables des «pleins» constitués par les immeubles. S’y ajoute la question de la mémoire, à savoir la capacité d’une ville à ne pas effacer les traces de son passé, mais d’en faire le moteur et le point de départ de son développement.

Le contexte a évolué de manière conséquente depuis les premières réflexions au début des années 2000 au sujet de Métamorphose et l’initiative populaire des «deux stades au Nord»: il va non seulement dans le sens d’une plus grande sensibilité au patrimoine bâti, notamment du XXe siècle, mais aussi dans celui de l’écologie et de l’économie des ressources. Il devient urgent de voir la préservation des ressources prendre le pas sur le gaspillage inconsidéré du potentiel du bâti existant.

Pour toutes ces raisons, Patrimoine suisse lance une pétition, avec le soutien des soussigné.e.s, afin que:

  • la valeur patrimoniale du stade de la Pontaise soit officiellement reconnue par l’État;
  • la planification des Plaines du Loup soit revue par la Municipalité de Lausanne dans le but de maintenir et de valoriser le stade de la Pontaise au profit des habitant.e.s des nouveaux quartiers, tout en maintenant ses capacités d’accueil pour des manifestations sportives et culturelles.

La Tour-de-Peilz, le 26 mars 2024

NB: Le récent retrait en mars 2024, par la Municipalité de Lausanne, du préavis N° 2023/71 plaide en faveur du maintien du stade de la Pontaise.

Votre soutien
Signer la pétition en ligne
Imprimer, remplir et renvoyer la pétition au secrétariat de PSSV

Liens utiles
Patrimoine suisse, section vaudoise: prises de position
Liste rouge de Patrimoine suisse
Émission RTS «Monumental», avec le professeur Franz Graf, 17.03.2024

La Distinction vaudoise de Patrimoine suisse 2024 récompense le manège du château de Mathod


21 mars 2024

Poursuivant son objectif de valorisation du patrimoine vaudois, la section vaudoise de Patrimoine suisse attribue, pour sa dixième édition, la Distinction à la restauration et transformation exemplaire du manège du château de Mathod, qui atteint simultanément les objectifs de conservation patrimoniale, d’efficacité énergétique et de grande qualité architecturale.

Distinction

Créé en 2007, ce prix honorifique est décerné tous les deux ans et récompense les propriétaires, communes ou associations particulièrement méritants en termes de conservation et de valorisation du patrimoine vaudois. Neuf distinctions ont déjà été attribuées, notamment pour les restaurations du Château de l’Aile et de la Salle del Castillo à Vevey (2018), la Fondation du Bois de Chênes (2020) et le Chemin de fer-Musée Blonay–Chamby (2022).

En 2024, la Distinction revient avec plusieurs nouveautés : le lancement d’un appel à candidatures, la nomination d’une commission en charge des évaluations, l’introduction d’une thématique spécifique et le changement d’appellation en « Distinction vaudoise de Patrimoine suisse » afin de se démarquer d’autres prix vaudois.

Énergie et patrimoine

Le changement climatique représente l’un des défis majeurs de notre époque. À ce titre, la Stratégie énergétique 2050 de la Confédération a donné une impulsion bienvenue à l’assainissement du parc immobilier suisse. Cette transition énergétique nécessite toutefois de prendre en compte les aspects culturels, patrimoniaux et paysagers inhérents au milieu bâti pour trouver des solutions spécifiques, innovantes et durables, adaptées aux bâtiments d’intérêt patrimonial.

En mars 2022, Patrimoine suisse, section vaudoise, a organisé le Forum Énergie + Patrimoine, une démarche pionnière autour de cette thématique importante. Ce fut l’occasion de proposer une plateforme d’information entre professionnels et praticiens issus de différentes disciplines, en particulier du domaine public, du secteur privé et du monde académique. Cet événement a offert une vision globale des enjeux liés à la transition énergétique de l’environnement bâti et un panel de solutions pragmatiques et adaptées. Le forum a laissé aussi une large place au débat et à l’échange d’idées dans un domaine en constante évolution. C’est dans cette continuité que la Distinction 2024 récompense un projet conciliant de manière optimale les objectifs de protection du climat et de préservation du patrimoine.

Le lauréat

Le manège du château de Mathod a été construit vers 1772 par Gaspard Burmann, ancien écuyer à la cour de Louis XV. Ce grand bâtiment en maçonnerie, couvert d’un imposant toit à la Mansart, perd rapidement sa fonction première ; il est signalé en 1838 déjà comme n’étant « plus qu’un vaste réduit ». Cette désaffectation se poursuit au long du XXe siècle ; le manège échappe même de peu à la destruction, après deux incendies. Ses remarquables qualités constructives mènent à son classement comme Monument historique d’importance nationale en 1975.

Garantir sa conservation à long terme impliquait de lui trouver une fonction. Toutefois, la difficulté de reconvertir cet important volume aux percements rares sans le dénaturer constituait un défi. Le projet mené par la famille Hernan-Rivier et le bureau Dolci Architectes à Yverdon propose l’aménagement d’un appartement et de chambres d’hôtes exploitées dans le cadre familial.

Le Comité de la section vaudoise de Patrimoine suisse a particulièrement apprécié la pertinence, la finesse et la réversibilité de l’intervention, de même que la juste adéquation des moyens mis en œuvre. En optant pour une approche différenciée de la substance bâtie et une combinaison de stratégies constructives – boîtes dans la boîte, isolations classiques, espaces non isolés – le projet atteint simultanément les objectifs de conservation patrimoniale, d’efficacité énergétique et de grande qualité architecturale.

« de 2 »

Les nominés

Deux autres projets de qualité ont été nominés au 2e rang ex æquo : la transformation d’un chalet du XIXe siècle dans la vallée des Ormonts et la restauration des anciens ateliers de reliure Mayer & Soutter à Renens.

Construit par Jean-Marc Lamunière en 1964 et réévalué récemment en note 2, le bâtiment Mayer & Soutter a été restauré par le bureau d’architecture lausannois Projet-Co. Le comité a apprécié la rigueur et la capacité d’innovation caractérisant cette restauration délicate, dont le résultat est remarquable. Il salue une contribution concrète aux enjeux liés à la conservation et à l’assainissement énergétique des bâtiments du XXe siècle, problématique promise à un développement important.

Datant de 1833, le chalet des Ormonts a été transformé par le bureau Studio Lausanne Architecture. Le projet consiste en un remaniement typologique important à l’intérieur, tout en conservant intacte l’enveloppe existante et, en particulier, ses percements. Le Comité a apprécié la franchise et la cohérence des choix architecturaux ayant guidé cette transformation d’un bâtiment recensé en note 4. Il s’agit d’un patrimoine modeste et peu protégé, mais constituant l’essentiel du corpus bâti des villages, bourgs et paysages ruraux traditionnels. À ce titre, le projet nominé mérite de faire exemple.

→ La Distinction sera remise le samedi 1er juin, à Mathod, en présence de la conseillère d’État en charge du patrimoine, Mme Isabelle Moret.

Télécharger le Rapport de la commission.

Photographies HD (presse): à demander auprès de beatrice.lovis@patrimoinesuisse-vd.ch

Le château de Gréchon : un patrimoine qui menace ruine


17 mars 2024

Construit durant la seconde moitié du XVIIIe siècle, le château de Gréchon est un objet patrimonial d’importance cantonale (note 2). Située en zone agricole, cet édifice présente une disposition très originale : le logement de maître, richement aménagé, dans le pavillon sud-ouest, celui du fermier dans le corps central et un rural accolé au nord-est. Le volume et les façades du rural font écho au logement de maître, ce qui permet à la bâtisse de présenter une certaine symétrie. Ce long bâtiment de 50 m est complété d’annexes et de jardins en terrasses. Le château a conservé sa substance d’origine (parquets, boiseries, décors peints, poêles en faïence, fenêtres, etc.), ce qui lui confère un caractère exceptionnel. Sa valeur historique est largement reconnue dans les milieux patrimoniaux, qui s’accordent sur le fait qu’il s’agit d’un bâtiment d’intérêt national. Or, resté inhabité depuis des décennies, cet ensemble se dégrade de manière dramatique : de nombreux dégâts sont apparus (infiltrations d’eau, mérule, vandalisme) et le rythme de ces dégradations ne peut que s’accélérer avec le temps.

Patrimoine suisse a sollicité en mars 2020 le classement du château de Gréchon et du four à pain voisin afin d’assurer leur sauvegarde et d’obliger ses propriétaires à entretenir leur bien de manière satisfaisante ou à s’en séparer. Le Conseiller d’Etat en charge du dossier, Pascal Broulis, a répondu alors que le Canton donnait suite à la demande de la Municipalité de Moudon de surseoir à cette requête, des négociations étant en cours en vue de l’acquisition de cet objet par un potentiel acheteur. Quatre ans plus tard, le château n’est toujours pas vendu et continue à se dégrader. Une interpellation a été déposée en février 2024 au Grand Conseil par Muriel Thalmann, députée et présidente de Patrimoine suisse, section vaudoise (cf. 24 heures, 28.02.24).

Forum ÉNERGIE + PATRIMOINE, Berne, mardi 24 avril 2024


17 mars 2024

Comment concilier protection du climat, mesures énergétiques et gestion respectueuse de la culture du bâti ? Dans le sillage du Forum Énergie + Patrimoine organisé à Lausanne en mars 2021, la section bernoise de Patrimoine suisse relance le dialogue, urgent et nécessaire dans le foyer de tensions actuel, à l’aide des acteurs directement concernés des secteurs de l’énergie, de la culture du bâti et des investissements. Il s’agit aussi d’offrir des procédures intelligentes à un large public et de présenter des propositions de solutions énergétiques exemplaires qui tiennent compte de la culture du bâti et empêchent les pertes d’énergie grise, tout en restant rentables.

Eventfabrik, Fabrikhalle 12, Fabrikstrasse 12, Berne
De 8h00 à 17h00.

Programme en ligne sur energie-baukultur.ch
Le forum est ouvert à tous. Inscription via : https://energie-baukultur.ch/fr/inscription/

Marguerite Burnat-Provins (1872-1952) et La Doges


26 février 2024

L’artiste et écrivaine franco-suisse Marguerite Burnat-Provins a fondé en 1905 la « Ligue pour la Beauté » – futur Schweizer Heimatschutz, alias Patrimoine suisse – alors qu’elle demeurait à La Tour-de-Peilz. Ce sont deux excellentes raisons pour la section vaudoise de Patrimoine suisse, qui a son siège dans la même localité, d’honorer cette personnalité hors du commun. Son portrait est rédigé par Anne Murray-Robertson, directrice de la monographie Marguerite Burnat-Provins. Cœur sauvage (Infolio, 2019).

Née à Arras, dans les brumes du Pas-de-Calais, la jeune artiste a puisé dans l’effervescence parisienne fin-de-siècle la rigueur du dessin académique, l’ésotérisme de l’iconographie symboliste, la fraîcheur des déclinaisons florales de l’Art nouveau et le goût pour les arts décoratifs. Son mariage avec l’architecte veveysan Adolphe Burnat, lui aussi formé à Paris, la conduit sur les rives du Léman : le jeune couple s’installe en 1896 à Vevey, au no 20 de la rue d’Italie, dans l’hôtel particulier des Burnat, situé non loin du Grand Hôtel du Lac.

Fils d’Ernest Burnat, aquarelliste et architecte reconnu, Adolphe reprend le bureau paternel en partenariat avec les Nicati. On lui doit les villas Bellaria, l’immeuble Nestlé (actuel Alimentarium) ou encore l’Hôpital de la Providence. Membre de la Commission vaudoise des monuments historiques, il a aussi participé à la restauration des châteaux de Chillon, d’Hauteville et de L’Isle, des églises Saint-Martin et Sainte-Claire à Vevey. Sans doute, les engagements de son mari ouvrirent-ils Marguerite à la sauvegarde du patrimoine.

En 1901, le couple déménage à La Tour-de-Peilz, au no 21 de l’avenue Sully (actuel no 41), dans une petite maison baptisée « La Gayole » (la cage en patois artésien). Comme à Vevey, Marguerite Burnat-Provins organise des expositions dans son atelier. Le rez-de-chaussée sert de lieu d’exposition pour Ernest et Élisabeth Biéler. C’est en 1898, chez les Burnat, qu’elle a rencontré le peintre vaudois qui va lui faire découvrir la grande nature alpine, plus particulièrement Savièse, où elle séjournera tous les étés jusqu’en 1907. C’est à ses yeux la période la plus heureuse et la plus féconde de sa vie, comme en témoignent ses portraits de montagnards (certains seront présentés à l’Exposition universelle de 1900 à Paris), ses scènes de la vie rurale et son intérêt pour les arts appliqués.

Militante infatigable, Marguerite lance le 17 mars 1905 dans la Gazette de Lausanne un appel à la constitution d’une « Ligue pour la Beauté ». L’article, intitulé « Les Cancers », dénonce le développement industriel et touristique débridé que connaît alors la région lémanique, entraînant un enlaidissement du paysage, alpin en particulier. Ce texte polémique suscite de nombreuses réactions enthousiastes. L’initiative est soutenue par des personnalités politiques, artistiques et intellectuelles comme Gonzague de Reynold, Ernest Biéler, Émile Bonjour, Adrien Bovy, Daniel Baud-Bovy, Philippe Godet, Édouard Vallet ou encore Paul Ganz. Sa proposition de constituer une « Ligue pour la beauté. Conservation de la Suisse pittoresque » aboutit à la création du Schweizer Heimatschutz. Sensible à la démarche de la Veveysanne, le président de la Confédération, le Vaudois Marc-Émile Ruchet, s’empresse de constituer à Berne, le 1er juillet 1905, un comité central, dont Marguerite devient membre. Cette lutte fera des émules jusqu’à Paris, Londres, Amsterdam et même en Algérie.

→ Lire le portrait dans son intégralité

Marguerite Burnat-Provins à 32 ans devant « La Gayole » à La Tour-de-Peilz, 1904, tirage argentique, photographe inconnu. Archives de la Collection de l’Art Brut, Lausanne

Hommage à Michel DuPasquier, membre d’honneur de Patrimoine suisse, section vaudoise


10 décembre 2023

Le comité de la section vaudoise de Patrimoine suisse a appris avec une profonde tristesse la disparition de l’un de ses membres, Michel DuPasquier, décédé le 18 novembre dernier à l’âge de 78 ans. L’architecte yverdonnois a été un membre très apprécié de la Commission technique de l’association.

Guy Vorlet, son collègue et ami, lui rend hommage.

.
A Michel

On dit que les pierres ne parlent pas, mais que le bois vit en permanence. Après avoir appris la triste nouvelle du décès de Michel DuPasquier et l’ayant très bien connu, eh bien, je suis certain qu’elles parlent, ces vieilles pierres! Elles dialoguent entre elles, vieilles et nouvelles, rénovées, préservées ou fraîchement taillées. Elles chantent avec le bois, les forêts, les champs, les villages, les paysages. Et si l’on prend le temps de les écouter, on peut entendre la demeure de La Doges et sa charpente se rappeler avec émotion et tendresse de l’instant où Michel DuPasquier a appris qu’André et Odette Coigny le léguaient à Patrimoine suisse. « Il n’y croyait pas », se souviennent les chaînes d’angle – «Il ne s’y attendait pas », murmurent le balcon et ses consoles – « Tout humble qu’il était, Michel DuPasquier ! », s’exclament les chambranles et les allèges des fenêtres.

Écoutons-les, toutes ces voûtes, ces rosaces et ces chemins de ronde qui ensemble claironnent haut et fort : « C’est grâce à lui, grâce à Michel DuPasquier, que nous existons encore, que nous sommes nettoyées, restaurées, mises en valeur ; grâce à lui aussi que nous rencontrons parfois de nouvelles pierres, de nouveaux édifices qui viennent appuyer leur jeunesse sur la colonne de notre expérience. Entrelaçant leur modernité à notre histoire tout en préservant et valorisant les deux. » – « Oui c’est bien vrai, chantent en chœur tous les monuments du patrimoine vaudois, Michel DuPasquier fut un fidèle défenseur de l’harmonie et du goût, a porté un grand respect à notre existence. » Il a donné des lettres de noblesse aux murs que d’aucuns croyaient trop vieux, il a incarné littéralement l’esprit même du « patrimoine ».

Et si vous n’entendez pas chanter les pierres et les murs, les tours et les créneaux, les maisons et les châteaux, alors ouvrez les yeux et regardez. Lorsque vous apercevrez un paysage harmonieux, un village niché au pied d’une colline, un château fièrement campé sur son éminence, il est sans doute possible que Michel Duspaquier ait été l’artisan de la préservation de ce qui enchante votre regard. Préserver la beauté d’hier, faire des liens avec celle d’aujourd’hui, écrire notre histoire en écoutant le passé pour valoriser le présent. C’est tout cela que nous devons à Michel DuPasquier, c’est tout cela que notre patrimoine bâti et les générations futures lui doivent.

Son souvenir restera aussi longtemps que les édifices qu’il aimait tant traverseront les années et les siècles, entretenus et protégés par tous les acteurs et les amis du patrimoine qui poursuivent le chemin qu’il nous a montré.

Guy Vorlet, à Yverdon-les-Bains, le 6 décembre 2023.

Photo Sarah Carp